Cette année la Pologne fête les 100 ans de sa renaissance, puisque pendant plus d'un siècle elle ne figurait plus sur la carte. A cette occasion, nous revenons sur certains évènements majeurs de son histoire qui nous aident à comprendre la façon bien spécifique avec laquelle la Pologne aborde les défis actuels.
Le début du mois de mai est une période généreuse pour les polonais. Les circonstances jouant en notre faveur, nous obtenons ce qu'on appelle "Majówka" (vacances de mai). Alors que le 1er mai – la Fête du Travail – a encore pour beaucoup de monde en Pologne « une mauvaise odeur du communisme » qui violait la souveraineté, le 3 mai porte toujours ce noble parfum d'esprit national. Le jour de l'anniversaire de la Constitution du 3 mai est autant célébré que la fête de l'indépendance. Même s'il y a près de 120 ans d'écart entre ces deux événements, il existe une continuité spirituelle entre eux. Ils ont été rendus possibles par le même esprit patriotique et l'amour de la liberté.
En 1791, dans les circonstances les plus défavorables, puisque depuis 1772 la Pologne avait été affectée par la première partition, le peuple polonais fit l'effort de faire revivre la souveraineté du pays en créant la Constitution. Celle-ci fut adoptée par le parlement de la République des deux Nations, une double monarchie établie en 1569, composée de la Couronne du Royaume de Pologne et du Grand-Duché de Lituanie. Les historiens conviennent que c'était une loi progressiste pour l'époque. C'était la deuxième constitution d’un État moderne dans le monde (après celle adoptée aux USA en 1787) et la première en Europe.
La Constitution devait guérir les corruptions politiques de la République des deux Nations causées par la mauvaise gestion du pouvoir de la noblesse polonaise. La nouvelle loi introduit la monarchie constitutionnelle, garantissait l'égalité politique entre la bourgeoisie et la noblesse et plaçait les paysans sous la protection du gouvernement. Elle interdisait le liberum veto qui permettait à un individu d'entraver la législation adoptée par le parlement. Les voisins réagirent avec hostilité à l'adoption de la constitution. En 1792, la République des deux Nations fut attaqué et vaincue par une alliance entre la Russie impériale et la Confédération de Targwica, formés de magnats polonais anti-réforme et d’une partie de la noblesse voulant conserver ses privilèges.
Même si l'intervention militaire n'accorda à la Constitution du 3 mai qu'une année d'existence, elle devint un symbole de lutte pour l'indépendance et la souveraineté de la République. La mémoire de cet acte aida la nation polonaise à survivre à de longues années d'annexion. La célébration officielle de l'adoption de la Constitution du 3 mai fut interdite pendant la période de partition. Cette fête nationale fut restaurée dans la deuxième République en avril 1919 et à nouveau interdite en 1945 par le régime soviétique et de nouveau restaurée après la chute du communisme en 1990.
Actuellement, la Constitution du 3 mai est considérée par les Polonais comme l'un des événements les plus importants dans l'histoire de la Pologne. Le même jour, le 3 mai, les Polonais célèbrent la fête officiellement établie par le pape Benoît XV juste après que la Pologne ait retrouvé sa souveraineté – la fête de Marie, reine de Pologne. On peut dire que les Polonais aiment justifier la célébration des anniversaires historiques par une fête religieuse, mais peut-être y a-t-il quelque chose de plus. Peut-être y a-t-il simplement cette conviction que sans l'intervention de Dieu, sans les supplications de notre Mère, nous n'aurions pas récupéré notre liberté. On pourrait appeler cela un sentiment. Ou on pourrait appeler cela la foi.